L’extraction, l’étape finale de la préparation du café

Illustration de l'extraction du café

L’extraction du café


Le café que vous buvez est le fruit d’une suite de transformations, de la ferme au consommateur, et je vous propose dans cet article de nous intéresser à l’étape finale de la chaîne : l’extraction, et plus précisément l’espresso.
L’extraction, c’est l’action de transformer votre café en boisson. Comme exemples que vous connaissez, on peut citer : l’espresso, le filtre papier, la cafetière à piston, la cafetière Italienne… la liste est longue, mais toutes les méthodes ont leurs attraits et parfois leurs écueils.


Espresso ou expresso ?

Le sujet que je souhaite traiter aujourd’hui se focalise sur une seule méthode, une des plus compliquées et capricieuses : l’espresso.


D’ores et déjà, un point de vocabulaire qui explique à lui seul le contexte : Pourquoi orthographier Espresso, et non Expresso ? L’expresso à la Française est un abus de langage, une déformation qui est devenue un nouveau mot usité par tous. Je soupçonne que son apparition a été naturelle, une déformation du mot express, car l’espresso est une méthode relativement rapide de préparation du café.


Origine de l’espresso

L’origine réelle de l’espresso, quant à elle, vient d’Italie, avec les premières machines à levier, autour de 1906. La signification du mot « espresso » vient du Latin exprimere, qui pourrait se traduire par « essorer » ou « extraire ». L’idée est d’utiliser une pression d’eau élevée pour forcer de l’eau à travers un lit de café, et d’en extraire sa quintessence.


L’espresso, par nature, est une boisson très concentrée : on extrait beaucoup de café à l’aide de très peu d’eau. Cela contraste avec les méthodes filtres, qui utilisent beaucoup d’eau, et peu de café.


Dès lors, la maitrise des paramètres est cruciale et la qualité de la boisson finale sera toujours sur le fil du rasoir, et la reproduction fidèle de l’espresso « optimal » un challenge pour le barista.

Quel sont le but et les paramètres de l’extraction du café ?


Le but de l’extraction est de faciliter et contrôler l’échange de particules entre le café et l’eau, afin d’obtenir une boisson finale délicieuse. L’extraction est le fruit d’une recette et comme en cuisine, un jeu complexe de paramètres donne un résultat final. Voici une liste non exhaustive des paramètres, et l’on se focalisera par la suite sur ceux que l’on va modifier aisément.


Les paramètres complexes, dans le sens où ils ne sont pas toujours modifiables facilement, à la volée, et sont dépendants du set-up dont dispose le barista.

 

Environnement :

  • Minéralité de l’eau, et système de filtration
  • Environnement météo : stable ou variable


Café :

  • degré de developpement de la torréfaction
  • fraicheur du café (post torréfaction)

Mouture du café :

  • qualité des meules du moulin à café, et répartition de la granulométrie
  • stabilité thermique du moulin


Machine Espresso :

  • pression nominale de la machine
  • courbe de mise en pression (pré-infusion)
  • débit d’eau de la machine
  • température d’extraction
  • stabilité thermique de la machine


Voici, cependant, des paramètres sur lequel le barista a tout contrôle :

  • taille de la mouture
  • tamping
  • dose de café
  • volume d’eau distribué
  • répartition de la mouture
  • corrélaire : temps d’extraction


Le but visé est d’extraire 20 à 22% de la dose de café dans la boisson finale. 
Ce qui veut dire que si l’on dessechait (au four, par exemple) la boisson, on obtiendrait 20% de la dose de café initialement utilisée pour la recette.
Par exemple, en faisant un espresso parfaitement extrait à 21%, avec une dose de 18g, on obtiendrait, après séchage, (18×21)/100=3,78g de café sec (+ la minéralité de l’eau, bien sûr).


Note : Cette règle s’applique aussi bien à l’espresso qu’aux méthodes douces.


Dans cette fenêtre optimale, le café offre son meilleur visage : une tasse équilibrée, ronde, avec la palette gustative représentant le terroir, la variété du café. On distingue une acidité, une sucrosité, et très peu d’amertume.
Sous 20%, on parle de sous-extraction, et elle se distingue par une tasse moins sucrée, plus acide, parfois insipide, paraissant creuse et légère. Cela étant, on peut tout à fait obtenir un espresso « sous-extrait » et plaisant, on y reviendra…
Au delà de 22%, on parle de sur-extraction, et les notes amères prennent le dessus sur le reste, teintant de sensations désagréables de sécheresse et de saveurs moins élégantes.


La distribution du café & Le tamping


Etape remise au gout du jour avec le café de spécialité qui en a un petit peu fait sont appanage, voire un symbole suranné, le tamping sert à compacter la mouture, de façon à créer un lit de café dénué de poches d’air. L’idée est de rendre impossible le passage de l’eau ailleurs qu’à travers la galette complète de café.
La distribution, étape préalable au tamping, est un work-in-progess : tout le monde s’accorde pour dire qu’une mouture bien répartie, voire texturée (à l’aide d’outils spécifiques), atteindra une meilleure extraction, plus homogène, plus facilement. Cependant, c’est une étape chronophage, les outils mécanisés sont encore au stade de prototypes, et leur utilisation en coffee-shop assez rare. Pour un home-barista, c’est clairement un point facilement mis en place, avec un gain clair en qualité d’extraction.

Les Ratios pour l’extraction du café

Un aspect important de la recette, et certainement le plus facile à communiquer, tient dans ce mot. 
On présente le ratio ainsi : dose/résultat, et généralement avec un temps d’extraction associé.
Lorsqu’un client pro me contacte avec un problème, ma première question est la suivante : quelle dose ? quel poids en tasse ? en combien de temps. Idem, lorsqu’on ferme une station espresso, on laisse une petite note pour le/la barista qui ouvre le lendemain.


Cela ressemble à cela :

  • 18g in
  • 40g out
  • 28’’


C’est la base de travail qui lui servira à régler sa machine, sur des paramètres qui sont connus pour être bons.


Lorsque je découvre un nouveau café, je commence toujours avec les mêmes paramètres, qui me servent d’étalonnage : un ratio plutot court (1:2), 25-27 secondes, avec une eau à 92°C. C’est un espressso assez dense, qui me donne une idée du potentiel : on peut facilement distinguer les notes de torréfaction s’il y en a, ainsi que l’acidité. C’est un espresso que je peux reproduire « à l’oeil », sans balance pour peser le poids en tasse, en arrêtant l’extraction lorsque le café sort blond, juste avant qu’il ne devienne trop « flotteux ».
Lorsque parfois, à la suite de multiples ajustements, je me perds dans ma recette, je reviens à cette base de travail pour me re-calibrer.


Dans les ratios, on peut nommer le ristretto, que je considère être sous la limite de 1:2, jusqu’à 1:1. Pour ce genre de recette, on cherche avant tout la densité, l’acidité et la sucrosité. Plutot adapté aux torrefactions medium à dark, j’ai le sentiment qu’il a de moins en moins sa place dans les coffee-shops de spécialité, car appliqué à une torrefaction légère de qualité, on obtient un espresso désequilibré, aigre, et surtout déplaisant.


Le lungo, quant à lui, est un ratio qui peut être adapté à certains types de clients, qui ne cherchent pas la texture dense, mais plutot un côté consensuel, facile d’approche. Je trouve que pour sortir un espresso sur un ratio 1:3+ de qualité, il faut éviter la pré-infusion, et faire un espresso assez rapide, autour de 20-23 secondes. C’est un espresso qui représente assez bien la palette aromatique du café, mais qui perd souvent sa longueur en bouche, et qui peut parfois avoir une finale aux notes un peu dures, sèches. Pour adoucir cet aspect, on peut parfois utiliser une eau un peu moins chaude.


On choisit donc un ratio pour le style de tasse que l’on souhaite représenter. Je conseille toujours de se tenir à la recette établie en début de service, et de ne pas en dévier. Pour cela, la construction des boissons doit être clairement établie en fonction de ce cadre. Par exemple, un allongé ne se fait pas en passant 3 fois le volume d’eau à travers le café, ce qui produirait une tasse très amère, mais en le rallongeant à l’eau chaude, en diluant simplemement un espresso bien préparé.
On me demande parfois un « ristretto », et là encore j’ai une petite esquive : je sers un espresso bien extrait, équilibré, en l’accompagnant d’une petite phrase : « je l’ai sorti un peu plus long qu’un ristretto, je trouve qu’il a vraiment un bel équilibre comme cela, n’hésitez pas à me dire ce que vous en pensez ». C’est une manière de désamorcer une situation qui pourrait être vue négativement par le client.


Une fois le ratio défini, le temps d’extraction peut être ajusté. Avec des paramètres de ratio stables, on peut jouer sur le réglage du moulin pour trouver le « sweet spot » du café : l’équilibre parfait entre acidité, sucrosité, le moins d’amertume possible.

Typiquement, cela donne ceci :

  • Mon espresso est trop amer => Sur-extraction => je grossis ma mouture afin d’accélérer le temps d’extraction.
  • Mon espresso est trop acide => Sous-extraction => j’affine ma mouture pour ralentir le temps d’extraction

Voici donc, pour moi ce qui représente les bases de l’extraction d’un espresso. Lorsque je suis face à du nouveau matériel, ou un nouveau café (puisque le ratio et les paramètres ne seront pas les même entre un café colombien ou un café éthiopien par exemple), je commence toujours par une recette très simple, un étalonnage facile pour vérifier que tous les paramètres de base sont atteignables. Vient ensuite la part plus fine des réglagles, où l’on modifie légerement un des paramètres pour mettre l’accent sur un trait du café, que l’on aille chercher son côté acidulé, sa sucrosité… ou même parfois juste énormément de corps pour servir de base à une boisson lactée.

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